
Hier, je me suis assise dans ma boutique d’artiste à Saint-léon-sur-vézère . Au milieu d’un grand désordre, les tableaux emballés, déjà prêts à partir. Je me suis assise pour sentir, pour me rappeler, pour dire au revoir. Oh mon dieu, j’ai pleuré ! Cette boutique, c’était l’aboutissement d’un rêve, de longues années à me chercher. Cette boutique, c’était honorer l’artiste et prendre soin de l’enfant en moi, sortir de ma bulle, lâcher les armes inutiles et m’équiper de celles réellement nécessaires.
C’était m’ouvrir au monde, dépasser des tonnes de peurs, oser surmonter les regards, les jugements, choisir ma vie, être moi. C’était croire en mon art, en mon coeur, en mes tripes, en ma petite voix, en mes compétences, en ma créativité, en ma sensibilité. C’était dépenser toutes mes économies et beaucoup d’énergie pour me donner les moyens et parier que j’arriverai à gagner de l’argent avec mon art. C’était semer un peu de beauté, de couleurs, de lumière, d’espoir, de poésie dans le monde … c’était prendre soin des âmes … c’était fleurir !
Alors je l’ai fait, avec des tonnes de peurs au ventre, j’ai foncé … et j’y ai vécu un tas de choses extraordinaires, effrayantes, banales, émouvantes, enrichissantes, bouleversantes ! En 3 ans, mon dieu que j’ai été comblée! J’ai ouvert mon coeur, montré mon âme et en échange, j’ai reçu des sourires par milliers, des regards pétillants, des coeurs vibrants, des mots tendres et émouvants, des paquets de compliments et d’encouragements, des tas de cadeaux, des accolades chaleureuses, des larmes de gratitude ou d’émerveillement.




En 3 ans, j’ai reçu beaucoup d’argent, plus que jamais j’en ai eu dans ma vie … pourtant, au vu des catégories administratives, je suis restée dans la classe des « pauvres » mais jamais je ne me suis sentie aussi riche de ma vie. Chaque jour cela me paraissait impensable, chaque jour des visiteurs s’enthousiasmaient face à mes créations et m’achetaient mes tableaux et leurs reproductions. N’est-ce pas extraordinaire ? Si un jour on m’avait dit ça, jamais je n’y aurai cru. Et pourtant si, le miracle a eu lieu. Un miracle, ça n’arrive pas tout seul. Il est la conséquence de pleins de petits miracles : de rencontres arrivées à point, d’un coup de main, d’une personne qui parle de vous en bien sans que vous le sachiez, d’autres artistes/artisans/commerçants qui vous soutiennent, de villageois adorables, d’une personne qui vous aide à débloquer des carcans, d’une libellule somptueuse qui vous rend visite au moment où vous êtes sur le point d’abandonner, d’un compagnon et d’une famille qui croient en vous, d’un lieu qui vous attend depuis longtemps sans que vous le sachiez, d’une dispute qui vous permet d’affirmer ce que vous voulez, d’un état tellement insupportable qu’il vous fait avancer d’un coup, d’une pensée lumineuse qui vous traverse l’esprit, d’un ami qui vous dit qu’il est fier de vous, de quelqu’un qui vous aide financièrement, d’une passion qui vous donne des ailes etc.
En 3 ans, j’ai fait danser mon compas à l’infini et s’exprimer mes pinceaux dans toutes les couleurs, j’ai parlé avec passion de mon travail, de mes recherches, de mon art. J’ai transmis mon art, mon savoir-faire et j’ai vu des débutants créer de magnifiques rosaces et mandalas. J’ai vu le soleil se lever dans certains de leurs coeurs.






J’y ai rencontré des personnes qui sont devenues des amis. J’ai eu tous les jours la compagnie et le soutien de mes adorables proprio et amis Olivier et Nathalie … l’aide précieuse aussi de ma Maman et de Gérald…sans leurs soutiens à tous, je ne serai pas aller bien loin ! J’ai eu la chance d’être entourée, appréciée et soutenue par de nombreux Saint-léonais.
Certains amoureux se sont rencontrés dans ma boutique. Héhé !
J’ai traversé des tempêtes … un jour, j’y ai même tout cassé.
J’ai aussi fait des choses folles qui resteront secrètes. Héhé !
J’ai douté, dansé, chanté, baissé les bras, mis la main sur mon coeur … j’ai salué le monde.
C’est à cet endroit même que j’ai reçu le coup de téléphone concernant mon fils qui m’a fait comprendre que ma vie allait basculer et que la sienne allait être très compliquée.
J’y ai pleuré… beaucoup …. pleuré d’impuissance, pleuré de joie, pleuré de désespoir, pleuré de gratitude.
Dans cette échoppe, j’ai entendu des conversations intimes et émouvantes, j’ai été le réceptacle d’histoires dramatiques.




J’y ai pris des cours d’anglais, j’ai dormi, flâné, rêvé, déposé des mots et des rimes, fait de l’hypnose, vu mes tableaux se mettre en mouvement, voyagé jusqu’au confins de l’univers, j’ai rencontré des gens passionnants, j’ai raconté ma vie et mes rêves, j’ai planté des graines dans des coeurs, j’ai rencontré beaucoup de mathématiciens, d’architectes, d’hypnothérapeutes et de praticiens reiki, beaucoup de gens aussi me parlant d’extraterrestres, de codes de lumières, de la kabbale et de trucs auxquels je n’y comprenais rien.
J’ai bu pleins de smoothies délicieux et aussi des bières et du rhum, j’ai fait la belle avec toutes mes jolies robes que j’adore, j’y ai mangé pleins de croissants avec du cocorichino, j’ai revu des anciennes connaissances, j’y ai déposé pleins de fleurs au point que si je les avais toutes plantées, ma boutique serait devenue un champ de fleurs sauvages aux mille et une couleurs.
Avec Gérald, nous y avons dansé, rêvé, trinqué… on s’est amusé, étonné, aimé, réjouit, inquiétés…nous y avons fait virevolter des tas de rêves et de projets … on a été survoltés et « souvoltés »… nous y avons laissé mûrir la plus belle graine de notre vie : Angelo !
J’ai beaucoup beaucoup travaillé dans cette boutique… j’ai été artiste-peintre-géomètre mais aussi encadreuse, créatrice de bijoux, galeriste, professeure de géométrie et de mandalas, graphiste, comptable, vendeuse, illustratrice, poète, vendeuse en ligne, publicitaire, conférencière etc… j’ai été épuisée tous les soirs comme jamais …le bruit, la poussière, les vacanciers en maillot de bain, les enfants bruyants, les pétarades des motards, l’agitation, la chaleur, parler, expliquer, répéter, les journées à rallonge, les passants n'osant pas rentrer, les zéros régulièrement en fin de journée… c’était épuisant. J’ai travaillé pendant des nuits entières et des journées non stop … Ça n’a pas été le rêve tout le temps. Mais finalement, il y a eu tellement de joie dans ce lieu que j’en ai déjà oublié tous les moments durs et épuisants.
J’ai envie de dire mille fois merci au monde entier et aux étoiles !
Je suis fière de moi !




Hier, je me suis allongée sur le sol froid de ma boutique. J’ai réalisé la douleur pour moi de quitter tout cela. Mais aujourd’hui, je me rend à l’évidence, je n’ai pratiquement plus aucun tableau à montrer, je n’ai pas créé depuis 2 ans, je suis épuisée, à bout de forces, je dois m’occuper de mon fils, ma charge mentale est trop importante, mes nerfs trop à cran. Sa maladie demande une présence et une gestion beaucoup plus grande qu’un enfant en bonne santé, une endurance physique et émotionnelle comme jamais je ne l’ai vécu. Il nous faut du temps pour mettre tout en place pour qu’il soit gardé et bien pris en charge sur tous les plans. Il nous faut du temps pour encaisser les chocs, accueillir ce qui se passe, réaliser, digérer, accepter, s’adapter. Et puis quand j’aurai retrouvé du temps pour moi, alors, il sera temps de me reposer, de me retrouver, de faire l’état des lieux des dégâts et retrouver l’énergie pour tout reconstruire. Et ainsi je pourrai recommencer à créer … je l’espère …
Même si je m’accroche à tout ce que j’ai vécu dans cette boutique, ce n’est plus la réalité d’aujourd’hui! Il y a des évènements dans la vie qui terrassent tout, qui font tourner brutalement la dernière page d’un chapitre, sans avoir eu le temps de lire les derniers paragraphes. Comme une maison qui brûle. Pas moyen de retourner en arrière. Elle est en cendre et un point c’est tout. Je ne peux pas faire semblant. Je ne peux pas forcer.
Hier, je me suis allongée sous ma vie … au calme de mon être … j’ai compris et décidé qu’il était temps de lâcher et quitter ma boutique d’artiste, de rendre les clefs … laisser s’envoler ce qui a été réduit en cendres, laisser la page de ce chapitre se tourner … et avancer, continuer d’avancer malgré la tempête …. En arrêtant de me débattre contre les vagues incontrôlables et garder mon énergie pour tenir bon les voiles !
Des graines ont été plantées, je n’en doute pas. Pour les autres et pour moi-même. Je vais laisser mûrir ces graines, à leur guise. Mon fil rouge est toujours là. Au fond de moi, je sais qu’un jour je reprendrai la création. J’aime trop les couleurs, mes compas, l’odeur du crayon et de la peinture de grenat, tracer de la géométrie, revisiter des arts ancestraux, peindre, écrire, rêver, m’émerveiller pour m’arrêter là. Je n’en doute pas. La forme que prendra mon activité professionnelle adaptée à notre nouvelle vie : je n’en sais rien. J’essaie juste de garder confiance. En moi, en la beauté d’Angelo, en la force de Gérald, en tout ceux et ce qui permet les miracles quotidiens … en l’amour. Et parfois, contre toute attente, c’est quand on accepte de lâcher ce qui n’est plus possible que s’ouvrent d’autres portes, d’autres horizons, d’autres possibles. Parfois.
Mille fois merci à tous et aux étoiles !
Je suis fière de moi !

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